Récit d’une auto-destruction!


Les courbes de l’Est…

La première fois où j’ai posé les yeux sur ses formes généreuses, je suis tombé amoureux! La regarder de face, de côté ou d’en arrière était aussi agréable chaque fois. Je savais qu’elle me donnerait du plaisir pour ensuite me faire mal, très mal… Mais je ne m’attendais pas à ce qu’elle aille jusqu’à me briser et m’écraser comme une mouche. J’ai sous-estimé la bête, encore. Le Mont Killington est une montagne mythique, pas la plus grosse, pas la plus haute, mais un peu comme les légendes sur les sirènes, elle intrigue tous ceux et celles qui y posent les yeux et les avalent presque tous pour les recracher vers l’enfer qu’elle leur préparait.

Le petit frère dans l’ombre

Mon amie Margaret m’a raconté une histoire que j’ai bien aimée; les montagnes de l’Ouest sont le grand frère de la famille. Grand et fort, personne ne les sous-estime, elles sont belles et imposantes et commandent le respect. Celles de l’Est sont le petit frère mal-aimé, petit et sombre dans l’ombre qui se battra jusqu’à la mort pour gagner le respect de tous. Personne ne le prend trop au sérieux, mais il est le vrai travaillant qui ne lâchera jamais prise. Lui seul te fera souffrir.

Sous l’emprise de son charme

J’ai vu et été battu par cette montagne pour la première fois en aout 2011. Oui, j’ai remporté l’épreuve, mais vraiment, c’est la montagne qui a gagné. J’ai appris que j’avais… des « faiblesses »; j’ai touché le fond et j’ai été battu pour la première fois de ma carrière d’athlète dans ses bras. Heureusement, je n’étais pas le seul dans son filet diabolique et la chance m’a souri en voyant la ligne d’arrivée avant les autres. Cette première défaite avec moi-même m’a charmé et j’y suis retourné l’année suivante, prêt pour elle, invincible. Elle m’a battu une deuxième fois. Cette fois par des entorses répétées qui me hantent encore 2 ans plus tard. En 2013, mes yeux étaient fixés sur une autre bête encore plus imposante, aussi méchante et difficile à apprivoiser, mais celle-là, j’avais réussi à la vaincre en 2010. Une bête olympique que j’ai ratée de peu et qui m’a renvoyé au fond du trou, les yeux rivés vers le Vermont où je m’en allais vers le succès personnel, rien de moins. Je ne demandais rien de précis côté performance. Les Américains ont crié haut et fort qu’ils allaient être les meilleurs, mais ont, eux aussi, sous-estimé la force noire du « Beast of the East ». En accumulant les victoires sur le circuit et en me préparant mieux que les dernières fois, j’étais cette fois, selon moi, enfin prêt à l’affronter.

Beast et Ultra, terminer seulement… pas trop mon style, on performe ou rien.

Je m’imaginais même pousser mes jambes à faire 3 tours plutôt qu’un aux Championnats (24km) et à l’Ultra le lendemain (43 km) tout en y allant pour le podium les 2 jours. Aussi bien préparé que je le sentais, la montagne avait d’autres plans pour moi. Elle m’a laissé l’apprivoiser pour quelques heures où je me sentais en contrôle, prêt à tout arracher, mais à mi-course elle m’a mordu; crampes… et encore crampes… chaque 2 ou 3 km, les crampes revenaient et je devais ralentir, laisser passer Cody, Jon, Bear, Hunter, Isaah, Max K, Braken, James… l’un après l’autre, j’ai regardé ces gars me battre et prendre les devants sur moi dans une course ou j’excellais dans les top 5-10 depuis 2 heures. Chaque montée est devenue interminable, chaque charge a doublé en poids et chaque minute s’est transformée en heure…

Les sacs diaboliques; MERCI Norm!

Le double «carry » de sac de sable (80lb) a été un des plus beaux moments avec moi-même que j’ai ressenti en 28 ans. Des sensations que je ne connaissais pas encore et où le petit diable (Blerch) parlait beaucoup plus fort que le petit ange qui avait quitté mon épaule pour reprendre son souffle! J’étais battu et je ne me suis pas relevé. Je dois avouer que je ne suis pas fier de le dire, mais c’est la vérité : la montagne a gardé mon âme pour quelques minutes durant cette épreuve et je lui ai laissée. J’ai terminé l’épreuve, je n’ai pas terminé la course. Je recherche les expériences en course, mais je n’accepte pas de simplement terminer une épreuve difficile. J’ai compétitionné et j’ai donné le meilleur de moi-même pour une bonne partie. Pour une rare fois, et une dernière j’espère (sûrement pas) je n’ai pas pu donner ce que j’avais dans le ventre tout le long et ÇA, c’est la raison même, pour laquelle j’adore le sport. Le sport vous brise pour voir si vous revenez plus fort ou si vous allez rester au sol.

Mon corps n’appréciera pas, mais je compte retrouver des parcelles de mon âme à la XMAN de Québec et revenir en force pour les OCRWC en Ohio dans 1 mois! Cette bête aura du fil à retorde pour me battre! Et ensuite la neige changera complètement le focus.

Claude, la Bête des Bêtes! Tassez-vous les boys, Claude veut passer.
Mon seul réconfort tout au long de mon calvaire était que Claude s’approchait, tout près. Elle était la première femme et allait être couronnée championne, pour la 2e fois, invaincue en 13 apparitions en 2014, 18 victoires en 20 courses à obstacles dans 3 pays. Ma brune, c’est elle la bête, la montagne n’a aucun effet sur elle. Félicitations Claude et merci aux gens qui nous ont supportés de près ou de loin dans nos aventures.

Ma montre me dit :

Que j’ai été en zone course 45 % du temps (je mourais petit à petit durant la 2e moitié)
Que j’ai brûlé 4670 kcal… ayayaye!
Que j’aurai besoin de 8 jours pour récupérer de cet effort!
Que j’ai monté l’équivalent de 2460 mètres sur 24.5km en 4 h 12.


Une 15e place décevante. Je vise le top 5 pour les OCRWC qui s’annoncent encore plus haut niveau.


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Marco

Un récit de Marc-André Bédard
Correction et révision Éric Julien
Crédit Photo Spartan Race USA

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